mercredi 29 juin 2011

À bientôt


Juin aura été un mois d’intense procrastination, d’absence de motivation. Mais ma vie bolivienne semble avoir repris du poil de la bête lors des derniers jours. Le désir de faire ce pourquoi je suis ici m’est réapparu en force. Et j’ai de nouveau le goût d’écrire. Je vous dois plusieurs histoires (El gran poder, la San Juan, le congrès d’ethnohistoire), et je me mettrai là-dessus en fin de semaine, à mon retour à La Paz, promis. À bientôt.

mercredi 15 juin 2011

Court bilan de mi-mandat


C’est long six mois. C’est long tout ce temps à passer hors de soi. Je retrouve en ce moment pour la première fois ces éléments qui me freinèrent tant avant que je ne parte, cette indisposition à être ailleurs. À mi-séjour, je constate l’étendu de mon manque qui se prolongera pour encore quelques mois. La Paz a beau être la plus belle laide ville du monde, je ne m’y sentirai jamais chez moi… Il y manque vous tous.

Au moins, j’ai eu droit à un échantillon de ma (vraie) vie ces derniers jours. François est en visite à La Paz depuis jeudi. Il est si bon de parler sa langue, de se retrouver sans filtre devant l’expressivité. Jamais je ne me retrouve en moi-même comme quand je peux en sortir sans l’hésitation d’une traduction. Cette première fin de semaine en compagnie de François s’est déroulée hors du temps. Hors du monde.  Elle a trouvé son pli vers trois ou quatre heures dans la nuit de samedi, se refermant sur elle-même en deux pages d’une même histoire : intoxication/désintoxication. Du bon vieux divertissement latino américain.

François vient de partir pour Coroico, une petite escapade en solo dans les yungas. Je tenterai de profiter de ces deux jours pour me replonger dans le travail. Des fois (souvent), je me dis que j’aurais du être littéraire ou sociologue plutôt qu’historien. Je hais les archives. Ok, laissez-moi reformuler, ostie que je hais les archives. En fait, c’est peut-être les archives boliviennes que je déteste. C’est peut-être aussi mon foutu sujet aux sources pas trouvables qui me fait dédaigner l’archive. Enfin, j’ai juste hâte d’avoir du matériel à analyser et ensuite passer à l’écriture. C’est ça que j’aime, pas la putain de collecte et tout le PR qu’elle implique…

Dans l’anecdotique, je commence des cours d’aymara lundi prochain. Je me suis dis qu’apprendre une langue aussi rependue dans le monde pourrait vraiment être un gros plus dans mes relations interpersonnelles. Vous saviez que l’aymara est une langue avec des clics (en fait, les consonnes occlusives peuvent être glottalisées), ça devrait être divertissant.

Sinon, samedi prochain est la fête del Gran Poder, sans doute la deuxième plus grosse fête en Bolivie après l’imbattable festival de Oruro. Toute une journée de danses et de musiques traditionnelles des quatre coins du département de La Paz. Et, Bolivie oblige, un journée + nuit de boisson, également. Je serai prudent promis, je vais également surveiller mieux François cette fois-ci. Contrairement à la tradition bolivienne, nous ne boirons pas jusqu’à tomber sans connaissance. Nous sommes de responsables adultes après tout.

Profitez de l’été bande de chanceux (mine de rien, je me claque trois hivers de suite) !

mardi 14 juin 2011

Valeurs ajoutées

La Bolivie est un pays canin. N’y cherchez pas trop les chats, ils s’y font particulièrement rares. Les chiens de tout acabits y peuplent les rues. En voici un échantillon en provenance de Sajama, Sucre, Copacabana et La Paz. Pour ceux qui les affectionnent.




Photo : Lindsey 




Photo : Lindsey  























mardi 7 juin 2011

En attendant

Il doit bien y avoir une éternité ou deux que je n’ai pas écrit. Pas l’envie, pas les péripéties non plus pour soutenir un anecdotique suffisant à votre bon divertissement. Ça saura venir. Un gros mois de juin en perspective avec, pour le plus grand plaisir du monde, la visite de François qui débarque ce jeudi à 5h00 du matin, et, pour le plus grand stress du monde, le congrès international d’ethnohistoire qui débarque à Sucre à partir du 26 juin. J’aurai de quoi vous raconter, vous divertir…

En attendant, je vous affiche une lettre que j’ai écrite en réponse au texte de Mathieu Bock-Côté dans Le Devoir de samedi passé (http://www.ledevoir.com/politique/quebec/324742/amir-khadir-le-chef-de-l-opposition-officieuse). J’ai rédigé la lettre sur le tard et je ne la trouvais en définitive pas assez bonne pour l’envoyer en réponse officielle au journal, mais je vous la donne quand même à lire… 

N’hésitez pas à me faire part de vos impressions sur l’implosion du PQ, la politique québécoise est tellement plus excitante depuis que je suis en Bolivie…

Réponse à MBC :

Il est beaucoup question d’Amir Khadir dans l’actualité québécoise des dernières semaines. Khadir le vertueux, Khadir le radical, Khadir le défenseur du peuple, Khadir l’extrémiste. De tous bords du spectre politique, on se positionne sur la dernière sortie du député de mercier, sur sa dernière affirmation, sa dernière entrevue, comme si Khadir était en lui-même un enjeux politique. J’ai beaucoup de respect pour Amir Khadir, pour la place qu’il s’évertue à maintenir bien seul sur la scène politique québécoise. Je trouve toutefois désolant que dans les dernières semaines, l’intérêt publique et médiatique semble s’être grandement détourné des enjeux défendus et débattus par l’unique élu de Québec Solidaire, pour se tourner vers le politicien, la figure publique en avale des idées. Ce pervers human interest, s’il offre une certaine publicité à son parti, nous désengage des idées et enjeux essentiels soulevés par l’unique représentant de QS à Québec.
Le texte de Mathieu Bock-Côté paru dans Le Devoir de samedi dernier, s’il prend pour point de départ la place qu’occupe en ce moment Amir Khadir dans l’espace politico-médiatique québécois, a le mérite de s’en servir pour aborder certains enjeux plus globaux qui, selon l’interprétation de l’auteur, découlent du rôle politique actuel du député de Mercier. Aux dires de Bock-Côté, Amir Khadir a su, au fil du temps, par force rhétorique, en misant sur une « coalition des radicalismes » (parlant de rhétorique, j’aimerais bien qu’on m’explique cette formule) créer dans le discours un souverainisme alternatif, alliant une certaine forme de socialisme et de nationalisme hérités de mouvances passées. Toujours selon l’auteur, en employant le langage de la décolonisation, Khadir a su rallier une certaine frange souverainiste davantage radicale, contribuant à l’effritement (une « cannibalisation ») du « souverainisme officiel ». Ce faisant, Bock-Côté avance que QS et son représentant, par la scission qu’ils créent dans le camp souverainiste et par l’idéologisation de la sphère discursive politique, risque, d’une part, de contribuer au maintien au pouvoir des Libéraux et, d’autre part, de se constituer comme un problème majeur pour les souverainistes du Québec.
De nombreux points de l’argumentaire de Bock-Côté relèvent de la pure rhétorique partisane, toutefois, en certains autres passages, le texte s’avère symptomatique de la stagnation de la cause souverainiste au Québec. L’auteur voit dans le nationalisme défendu par Khadir, et par extension QS, de nombreux artéfacts d’un souverainisme passé. Ces artéfacts s’incarnent dans ce que ce Bock-Côté nomme un nationalisme décolonisateur. La formule est habilement choisie si le but qu’elle sert est de faire paraître anachronique la position défendue par Khadir. Or, les éléments qui constituent ce nationalisme, qu’importe l’épithète qu’on lui appose, sont d’une actualité criante, et s’ils paraissent provenir d’une autre époque c’est qu’ils ont tristement été évacués du discours souverainiste « officiel » (selon la formule indéfinie de l’auteur).
Loin d’être extraite du passé, la critique d’une certaine forme d’impérialisme (disons, pour être plus actuel, d’un capitalisme financier déconnecté des toutes valeurs d’équité et de justice sociale), à une époque de plus en plus orientée vers une perspective transnationale (flux migratoires, diasporas, médias électroniques, réseaux sociaux, ONG, etc.), ne peut être dissociée d’un discours qui projette la constitution d’un nouvel État nation. Il en va de la place que cherche à s’octroyer lui-même le Québec dans un espace qui dépasse ses uniques frontières. De même, la question des ressources naturelles et de la « spoliation du pays » est indissociable de la critique susmentionnée et est inséparable, hier comme aujourd’hui, du devenir de la nation. Il y est question des moyens que l’on s'alloue pour notre propre émancipation. La communauté que l’on s’imagine en Terre de Québec doit, pour sortir de sa projection mentale, s’arroger les moyens de son existence. Finalement, le désembourgeoisement du souverainisme actuel n’appartient pas à un combat passé, il est une réponse à l’échec émancipatoire jusqu’à aujourd’hui encaissé. Comme le disais Miron, il y a une quarantaine d’année de cela, « nous n’avons pas su lier nos racines de souffrance/à la douleur universelle dans chaque homme ravalé ». Le désembourgeoisement est un désenclavement, c’est le pas premier vers un nationalisme d’ouverture, un souverainisme de main tendue, qui ne tolère les laissés pour contre, qui se construit dans l’embrassade; C’est le regard portée sur la nation en tant que communauté, que collectivité partagée, que franche et universelle camaraderie. La nation comme elle ne peut qu’être !  
C’est l’incapacité de Bock-Côté à percevoir la nécessité d’un idéalisme politique dans l’avènement du changement – idéalisme en tant qu’orientation de la pensée et de l’action en fonction d’un idéal – qui lui fait percevoir un manichéisme primaire dans les positions du porte-parole parlementaire de QS, et qui lui fait mépriser la réintroduction minimale d’un radicalisme transformateur dans l’arène politique officielle. C’est cette cécité qui l’incite à constituer des clans souverainistes distincts comme s’il ne s’agissait pas d’une lutte commune qui ne peut se gagner que dans l’inclusion générale. Le PQ et les souverainistes n’ont pas de problème, ils ne sont plus seuls.
Dans la communauté que j’imagine, vous y êtes aussi…